Jour 19 // Prague (CZ) - Pilsen (CZ)

Avouons-le d'emblée: ça a été difficile de partir. Nous n'avions aucune envie de nous remettre en route, de partir de cette belle ville. La fatigue des jours intenses à Prague s'est accumulée à la fatigue du voyage Neuchâtel-Prague à vélo.

La plus jeune du groupe nous a initié au chocolat Dubaï dans l'espoir de nous donner du courage. Même cette dose de sucre n'a pas suffi à motiver les troupes.

Pourtant, d'une manière ou d'une autre, nous avons fini par réussir à tout ré-harnacher sur les vélos, les gravures de Raquel ont trouvé leur place bien à plat à l'abri des intempéries sous le panneau solaire de Souricette.

Les gros pavés irréguliers ont accueilli nos premiers tours de pédales et nous avons très vite remarqué qu'Holly, malgré le changement des pneus à Regensburg était à la traîne. Un nouveau passage dans un magasin de vélo s'est imposé - pour réaliser que nous étions plus au clair qu'eux sur la mécanique d'un tandem électrique.

Nous avons, à rebours, réemprunté le chemin de notre arrivée à Prague 10 jours avant. Et nous avons tous senti les transformations qui avaient eu lieu en nous - corps et âme.

En arrivant nous nous étions demandés ce qu'un immense théâtre ou opéra faisait en bord de ville. Au sortir de la ville, nous avons réalisé qu'il s'agissait tout simplement de la station d'épuration de Podol !

Avant de quitter la Vtlava, Matthieu a encore du reprogrammer le contôleur du moteur avant de Holly. On se passerait de ce genre d'activité, mais il est des bureaux plus désagréables!

Lors d'un arrêt en fin de journée dans un village de la campagne Tchèque, nous avons eu la surprise d'entendre enfin ce qui sortait des hauts-parleurs installés dans chaque village que nous avions traversé. D'abord joyeuse polka pour attirer l'attention, puis énumération de quelques informations villageoises (notre...

Le chemin est aussi important que le but, et c'est dans cet esprit que nous menons nos activités depuis bien des années, mais n'oublions pas malgré tout que le déclencheur de notre grande aventure praguoise était une participation à la grande conférence européenne consacrée au langage de programmation Python: Europython 2025.

Pour quelqu'un comme moi qui passe un nombre important d'heures à programmer, seul, des choses que peu de mes collègues sont capables de comprendre, ces moments de partage entre spécialistes sont de grandes bouffées d'oxygène.

Europython, c'est donc trois jours passés en compagnie d'environ 1'300 personnes plus ou moins spécialistes du langage Python, c'est une sélection à faire parmi 120 talks qui parlent de sujets les plus divers; mais c'est aussi - et peut-être surtout - l'occasion de partager mes recherches avec des gens qui ont la capacité de les comprendre, de les apprécier pour ce qu'elles valent, de les critiquer là où elles le méritent. Que le retour soit, un "ça me donne donne envie d'explorer ça par moi-même" plein d'étoiles dans les yeux ou un incrédule "franchement, vous oseriez utiliser ça en production?", c'est un retour que je n'ai pas souvent l'occasion d'avoir et ça fait du bien!

Ceci d'autant plus que la communauté Python est extrêmement sympathique et amicale. Je ne sais pas si cela est spécifique à ce langage ou si les rencontres javascript/go/rust/c#/... sont aussi conviviales, mais en tout cas là, l'ambiance était détendue et agréable, très propices aux échanges informels durant les pauses.

Bon, il n'y a pas que les pauses, et une telle conférence, c'est quand même aussi l'occasion de découvrir des projets ou les gens derrières des projets connus. Profiter des conseils et retours d'expérience du développeur principal de FastAPI, un framework qui fait tourner des dizaines (centaines?) de milliers de sites à travers le monde; découvrir comment le fait de ne pas être...

Nous avions promis quelques reflets de notre voyage Neuchâtel - Prague et retour. Le but est la présentation d'un résultat de recherche en lutherie augmentée par Matthieu Amiguet. La conférence est donnée dans le cadre de EuroPython 2025. Le trajet se fait à vélo à travers la Suisse, l'Allemagne et la République Tchèque. En tout, nous parcourerons 1700km sans les détours.

Voici le récit des premiers jours entre canicule, jolies routes, cigognes, fleuves, architectures variées, festival de Würste, fatigue et rires.

Jour 1 - Départ // Neuchâtel (CH) - Solothurn (CH)

Au moment du chargement, nous avons trouvé un trèfle à 4 que nous avons pris comme bon augure pour notre périple. Nous suons déjà à grosses gouttes avant même le premier tour de pédales, le soleil tape fort. Au moins, le panneau solaire de Souricette y trouve son compte.

Ce n'est qu'avec 5 heures de retard sur notre programme que nous avons réussi à décoller. Premier arrêt après 2km chez Dario (biketothefuture.ch) pour un au revoir après nos semaines de préparation des vélos. Matthieu constate que Souricette a perdu son circuit 12V perdant donc phares et clignoteurs - il profite donc des outils de Dario pour réparer cela.

Pendant ce temps, les fashion victims de l'équipe courent au centre commercial pour s'acheter la vaisselle bling-bling pour fureur au camping.

Première journée au bord de l'eau... lac de Neuchâtel, canal de La Thielle, île St-Pierre (ptit coucou J-J Rousseau), lac de Bienne et son vignoble, première rencontre avec l'Aar et après quelques kil de Pampa bernoise, le premier beau pont en bois couvert à Büren-an-der-Aare.

Le soir arrivée chez Clémence et Remy à Soleure. La baignade et les grillades dans le jardin (on se souviendra du grill chanteur!) ont permis de se rafraîchir dans la canicule.

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Voici le texte du discours de Matthieu Amiguet lors du vernissage du Rapport #10:

Hâtez-vous lentement, et, sans perdre courage,
Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage
Polissez-le sans cesse et le repolissez;
Ajoutez quelquefois, et souvent effacez.

Dans ce monde où la vitesse est érigée en qualité ultime, où l'on confie à une machine le soin d'écrire à ses collègues ou amis afin d'avoir le temps de lire ce qu'ils ont fait écrire pour nous par une machine, il peut être bon de se remémorer ces vers que Boileau a écrit en 1674.

En cette période où la grande histoire gronde dans un lointain pas si lointain, nous faisons ici le pari de nous intéresser à la "petite histoire", celles des gens, celle du proche. Vous trouverez dans cette nouvelle édition du Rapport des récits de rencontres, d'ici et de maintenant.

Bien sûr, la petite et la grande histoire se tissent continuellement, et si l'Histoire avec un grand H fournit le fil de chaîne, tout s'effilocherait sans les fils de trame: les gens, le quotidien qui slaloment et relient en un dense réseau de chemins de traverse.

Parfois on s'en passerait: ainsi du nouvel éclairage amené par l'actualité récente sur l'article où Ahmad Motalaei relate ses souvenirs d'enfance dans un Ispahan bombardé. Mais c'est là aussi, et surtout, qu'il faut prendre soin du proche, de la trame qui relie, des traverses. Une pensée toute spéciale donc pour ceux qui gravitent autour de nos chemins et qui sont touchés de près par la brûlante actualité: Ahmad bien sûr, mais aussi Laurent et Fatemeh, Gaëlle, Zara et bien d'autres.

Parfois les grands courants sont plus réjouissants: dans à peine plus de deux semaines, une petite équipe se rendant à Prague pour présenter dans un congrès les récentes recherches développées ici même autour de la lutherie augmentée, une petite équipe, donc, traversera la frontière Tchèque à vélo...